Plan de relance européen : pourquoi est-ce historique ?

Depuis le vendredi 17 juillet 2020, les 27 pays de l'Union européenne négociaient un plan de relance commun. Mardi 21 juillet, un accord a été trouvé et Emmanuel Macron a qualifié cette journée d’"historique". On vous explique pourquoi ce plan de relance européen marque une avancée historique à plusieurs égards.


Une solidarité budgétaire inédite

À l’issue du Conseil européen extraordinaire, qui s’est tenu du 17 au 21 juillet 2020, le président Emmanuel Macron a déclaré : "Nous avons obtenu un accord historique pour notre Europe".

Ce qualificatif pourrait sembler exagéré, mais il ne l’est pas car, pour la première fois, la Commission européenne va pouvoir émettre de la dette commune afin d’aider les pays les plus frappés par la crise sanitaire du Covid-19, à savoir l’Italie, l’Espagne et la France.

Cela signifie que, pour la première fois, la Commission européenne va emprunter de l’argent au nom de l'Union européenne et répartir les fonds entre des prêts et des subventions accordés aux différents États.

L’accord obtenu de haute lutte par le couple franco-allemand renforce donc la solidarité européenne sur le plan budgétaire. Il a d’ailleurs été immédiatement salué par les marchés, en hausse, et par la présidente de la BCE, Christine Lagarde par ces mots : "l'UE se rassemble et progresse".

Quant à Emmanuel Macron, il n’a pas hésité à parler de "moment le plus important de la vie de notre Europe depuis la création de l'euro".

Des subventions généreuses

Au terme d'un sommet marathon, les 27 pays européens se sont accordés pour octroyer des subventions aux pays les plus touchés par la crise du Covid-19, sur la base d'un emprunt commun.

Le principe de subventions a été arraché non sans difficulté aux pays frugaux (Pays-Bas, Autriche, Suède, Danemark, Finlande) qui n'en voulaient pas. Angela Merkel et Emmanuel Macron, qui proposaient au départ 500 milliards de subventions, en ont obtenu 390 car ils ont dû marchander avec les pays "frugaux" du Nord, opposés au principe même d’une dette commune.

Au final, ce plan de relance européen de 750 milliards d'euros se compose de 360 milliards de prêts et 390 milliards de subventions (312,5 milliards de subventions directes plus différentes lignes du budget pluriannuel pour un montant de 77,5 milliards d'euros).

Au cours de ce sommet marathon, les 27 ont aussi décidé du budget européen pour les années 2021 à 2027 : 1.074 milliards d’euros.

Des conditions nouvelles

Malgré d’inévitables marchandages et concessions, ce plan de relance européen marque une avancée historique pour l’Europe à bien des égards.

Outre une solidarité budgétaire jamais vue jusqu’alors, cet accord a été marqué par d’autres grandes premières dans l’histoire de l’UE.

En effet, pour pouvoir bénéficier de ces subventions européennes, les pays de l’UE devront remplir certaines conditions tout à fait inédites : le respect de l'État de droit et l'obligation de consacrer au moins 30% de cet argent au climat.

Pour la première fois dans l'histoire de l'Union européenne, le versement des aides pourra être suspendu en cas de violations de l'État de droit et de la démocratie. Cette décision vise en particulier la Hongrie et la Pologne, deux régimes nationalistes qui ont déjà porté atteinte à l'indépendance de la justice et des médias selon Bruxelles.

Il a aussi été convenu que 30% des dépenses engagées dans le cadre du plan de relance européen devront cibler le changement climatique et ce afin d'atteindre l'objectif de neutralité carbone en 2050.

40 milliards de subventions pour la France

L'Italie, l'Espagne et la France, qui sont les trois pays les plus touchés par le Covid-19 , vont recevoir la plus grande part des subventions : 60 milliards d'euros pour les deux premiers et 40 milliards d'euros pour la France.

Bruno Le Maire a déclaré : "Nous disposons dès maintenant de 40 milliards d'euros supplémentaires que nous allons pouvoir ajouter à l'argent du budget français […] à l'intérieur des 100 milliards" prévus pour le plan de relance national sur deux ans (qui sera présenté lors du conseil des ministres du 24 août).

Ces 40 milliards devraient aider notre pays à financer les grandes priorités de son plan national : soutien aux entreprises, plan pour l'emploi des jeunes, rénovation thermique des bâtiments, développement de nouvelles technologies vertes (plan hydrogène, filière recyclage) et développement du fret ferroviaire.

Il faut toutefois préciser que la France devra par ailleurs contribuer davantage au budget européen, à cause du Brexit qui a diminué les ressources de l’UE mais aussi des rabais supplémentaires consentis aux pays "frugaux" (Pays-Bas, Autriche, Suède et Danemark) lors des négociations.


Pour conclure, ce plan de relance européen est bel et bien historique. Mais il a entraîné des coupes budgétaires contestables dans des domaines pourtant essentiels pour l'avenir de l'Europe, comme la santé, la recherche et la défense.

Il soulève aussi un nouveau défi de l'Europe : développer des ressources propres pour rembourser son emprunt. Les 27 ont d’ores et déjà prévu le lancement dès 2021 d'une taxe sur les plastiques à usage unique.

D’autres débats devraient suivre sur la taxe Gafa, sur une taxe carbone aux frontières et sur une réforme des ETS (Emission Trading System).

Plus d'informations : https://www.consilium.europa.eu/fr/meetings/european-council/2020/07/17-21/

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